Construire une équipe de soutien
Rédigé par Millions Missing France - - Aucun commentaire
L’isolement est un facteur d’aggravation.de l’encéphalomyélite myalgique. Sans aide pour leur quotidien, les personnes malades sont contraintes de dépasser leurs limites, tout simplement pour répondre à leurs besoins essentiels, comme le met en évidence cet article de notre partenaire Carenity.
Si le pacing est une base de la prise en charge, pour l'immense majorité des malades, il est difficile voire impossible à mettre en place sans aides au quotidien. Qu’il s’agisse de soutien familial, amical, entre voisins ou encore institutionnel, la présence d’aidant⋅es est un des piliers de la prise en charge de la maladie.
Quel est le rôle d'une équipe de soutien ? Quand la mettre en place et comment faire ? Comment l’organiser ? Quelques pistes dans cet article, issues des expériences et d’échanges entre malades.
Une équipe de soutien, c'est quoi ?
C'est un ensemble de personnes, salariées et/ ou bénévoles, institutionnelles, associatives et/ou proches, qui apportent de l'aide pour les tâches quotidiennes.
Leur aide peut être continue (comme la présence d'une personne en permanence au domicile), régulière (par exemple des soins infirmiers tous les jours), ou ponctuelle (coups de main pour des courses, du ménage, amener à un RV médical, préparer des repas etc).
Pourquoi mettre en place une équipe de soutien ?
L’objectif d’une équipe de soutien est de limiter au maximum les surcharges d’activité pour la personne malade. Il est impératif avec l'EM de respecter ses limites, de ne pas en faire trop, pour éviter les malaises post-effort.
Dans une société idéale qui prendrait soin des plus fragiles. l’aide des services publics devrait être automatiquement mise en place dès que nécessaire. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Les services publics dysfonctionnent à tous les niveaux. Mettre en place de véritables politiques publiques de soutien constitue une urgence de santé publique et de justice sociale.
Les personnes souffrant d’EM sont victimes d’un manque de reconnaissance institutionnelle, d’un déficit de formation des professionnels de santé et de l’absence de parcours de soins adaptés. Elles se heurtent à des dispositifs médicaux et sociaux inadaptés à leurs besoins et lourdes administrativement. Résultat : beaucoup de malades se retrouvent à gérer seul⋅es une maladie invalidante, alors même que leur état de santé devrait leur donner droit à une prise en charge sérieuse.
Face aux carences des services publics, la charge de la recherche d’aides et de soutiens repose exclusivement sur les malades. L'entourage direct constitue souvent la seule aide possible dans un premier temps.
Apprendre à demander de l’aide
Demander de l’aide n’est jamais évident. Beaucoup de malades ressentent de la peur, de la honte ou de la culpabilité à l’idée de solliciter autrui.
Apprendre à formuler clairement ses besoins, accepter ses limites et dépasser le sentiment de déranger sont des étapes essentielles. Cette démarche permet aussi de diversifier ses sources d’aide au-delà du cercle familial, souvent déjà très sollicité.
Quand mettre en place son équipe de soutien ?
Dès qu'on a le diagnostic, et même si les personnes ou les organismes sont peu sollicités dans un premier temps.
L'état de santé d'une personne souffrant d'EM peut s'aggraver très brutalement. 67 % des malades ne récupèrent pas de leur état antérieur après un malaise post-effort. Nous voyons des personnes qui passent brutalement d'un état léger, dans lequel elles sont encore autonomes, à un état sévère où elles ont besoin d'aide d'urgence. Les situations peuvent vite devenir dramatiques si les malades sont dans l'isolement.
Anticiper, c'est le maître mot.
Par quoi commencer ?
Dans un premier temps,solliciter une ou deux personnes de son entourage. Leur demander
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de repérer les structures et les dispositifs existants : services publics, mais aussi commerces qui livrent à domicile, professionnels de santé qui se déplacent, sociétés de portage de repas si besoin, services sociaux etc
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de contacter les services, par ordre de priorité selon le cas de chaque personne.
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d’initier les premières démarches administratives, à adapter selon les cas (invalidité, demande de financement, de logement social, demande AAH…)
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de trouver des volontaires, par exemple en envoyant un mail aux proches pour leur demander s'ils seraient prêts à donner des coups de main et dans quels domaines, ou pour poser des affiches dans le voisinage pour des coups de mains ponctuels
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de créer un groupe d’échanges pour gérer les demandes et propositions d’aide
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etc
A adapter selon les besoins, mais anticiper le plus de situations possibles, y compris un potentiel déménagement dans un logement adapté pour les personnes à mobilité réduite, avec des critères impératifs (salubrité, calme, proximité des services).
Les services publics et les aides sociales
Les services publics proposent des dispositifs pour alléger le quotidien et une prise en charge financière (MDPH, CAF etc). Ils sont globalement difficiles d’accès, soumis à des critères restrictifs et demandent des démarches administratives lourdes, sans parler des déplacements souvent indispensables. Mais ils existent, et ce sont des droits acquis parfois durement, il faut les solliciter autant que possible pour faire respecter les droits des personnes malades ou souffrant de handicap.
La complexité et l’éparpillement des aides demandent un repérage fin. Parfois, même les assistantes sociales ne sont pas au courant de tous les dispositifs qui existent ! Contacter les assistantes sociales de différentes structures, chaque structure ayant ses compétences (CCAS, CAF, MDPH, CPAM, CARSAT… )
Les CCAS (Centres Communaux d’Action Sociale), présents dans chaque commune, sont un point d’entrée privilégié : accompagnement administratif, aides financières, orientation vers des services d’aide à domicile, portage de repas, etc. Ces structures sont là pour proposer des solutions personnalisées. Il suffit d’appeler la mairie pour avoir les coordonnées et les permanences. A Lyon, contacter les maisons de métropole.
Lors d’une hospitalisation, demander à rencontrer l’assistant⋅e social⋅e du service, pour avoir droit à des aides à domicile voire à une aide financière pour l’achat de matériel médical non remboursé (barre de douche, planche de bain etc), ou encore à la mise en place d’une hospitalisation à domicile si besoin.
Les caisses de retraite et les mutuelles ont également des fonds spéciaux, par exemple pour financer des aides ménagères en sortie d’hospitalisation. Il existe aussi des fonds spéciaux au Conseil départemental, dans les lycées, les collèges etc, pour faire face à des dépenses imprévues, à la difficulté de payer l’internat ou la cantine d’un enfant etc.
Organiser son équipe pour épargner ses proches
Répartir les charges est important pour impliquer les proches sans les sur-solliciter. Quand la charge repose sur une ou deux personnes, cela peut vite devenir beaucoup trop lourd pour les aidant⋅es. C’est plus facile de dire oui quand quelqu’un demande un coup de main ponctuel que de s’engager dans une aide au quotidien.
Bien identifier ce que chacun peut apporter selon ses disponibilités et ses compétences : une aide pour les courses, une présence régulière, un soutien administratif, un accompagnement ponctuel à un rendez-vous médical, une visite amicale, etc.
Créer un groupe d’échanges (WhatsApp ou équivalent) avec les proches et les volontaires. La personne malade formule une demande sur le groupe. Un⋅e membre du groupe disponible sur le créneau et le service demandé se propose. Le fait que les demandes soient vues de tous et que des personnes différentes puissent se partager le job est plus efficace et plus motivant.
L’accès au logement peut être facilité par l’installation d’une serrure à code. Sinon, penser à transmettre les codes d'accès, faire des doubles de clé etc.
Un cahier de transmission au domicile de la personne malade est important aussi pour communiquer entre les aidant⋅es. On y note ce qui a été fait, ce qui reste à faire, une astuce qu’on a trouvée etc
Mettre par écrit les consignes : affiche dans l’entrée indiquant les précautions à prendre, listes avec consignes précises pour le ménage (bruit, produits…), les courses (intolérances à spécifier) etc.
S’appuyer sur d'autres organismes locaux
Il existe parfois, surtout dans les grandes villes, les structures qui peuvent proposer localement une aide concrète. Elles sont généralement connues des assistantes sociales des services publics. Penser aux associations d’aides comme le Secours Catholique, Secours Populaire, Solid’R, Restos du Coeur, Société St Vincent de Paul etc.
Il y a aussi possibilité de s’appuyer sur les lieux de culte : paroisse, temple, synagogue, mosquée et autres groupes religieux. Restez vigilant⋅es, certaines structures religieuses ne sont pas forcément recommandables.
L’application Dear Helpee permet de trouver des aidant⋅es rémunéré⋅es. Fonctionne surtout dans les très grandes villes)
Rompre l’isolement social
Pour un soutien psychologique, l’Association Astrée ou encore Les Petits Frères des Pauvres par exemple proposent des visites ou des accompagnements personnalisés. Il y a aussi des plateformes d'écoute dédiées, comme SOS Amitié.
La pair-aidance est une aide précieuse. Rejoindre une association de patients permet de rencontrer des personnes confrontées à des situations similaires et de partager des stratégies utiles au quotidien. Millions Missing France propose à ses adhérents des groupes d’échanges Facebook favorisant entraide et soutien moral. Notre partenariat avec Carenity vous permet aussi d’accéder à un forum spécifique pour les malades d’EM.
Certains malades organisent des courtes séances de visioconférence, des discussions sur des groupes à leur rythme, ou encore regardent simultanément un film ou une émission pour échanger ensuite, créent un mini-club de lecture, n atelier d’écriture ou encore un groupe de loisir créatif en distanciel etc.
Cohabiter ?
Envisager une colocation adaptée, par exemple avec des étudiant⋅es (infirmier⋅es, aides-soignant⋅es…). Les habitats inclusifs sont également une solution, chaque personne y a un espace privatif adapté, mais il y a une prise en charge personnalisée pour le ménage, la préparation des repas etc.
Des sites comme Workaway ou un ToitChezMoi proposent d’héberger quelques jours ou quelques semaines une personne qui voyage, en échange de tâches quotidiennes. Ce peut être adapté pour les malades en état léger ou modéré qui sont en état d’accueillir et disposent d’une chambre indépendante. C’est l’occasion de mettre un jardin au propre, de faire du ménage à fond, de préparer des plats individuels à mettre au congélateur etc.
EM ton voisin
Millions Missing France lance une nouvelle action : mettre en contact malades et potentiels volontaires. Nous sommes en train de préparer un kit, avec entre autres des affiches à poser dans le voisinage.
Vous avez connaissance de personnes malades d’EM et qui sont en difficulté ? Collègues, amis, voisins, n’hésitez pas à leur proposer votre aide en écoutant bien leurs besoins, elles n’osent peut-être pas vous solliciter. Conseillez à la personne malade d'
Vous souhaitez aider bénévolement et ponctuellement une personne souffrant d’EM ? Adhérez à Millions Missing France et remplissez ce formulaire. Même les plus petits gestes peuvent faire la différence !
Ensemble, on est plus forts.
Ressources utiles pour les aidants
- Conseils génériques
- Accompagner une personne sévèrement atteinte
- Document de synthèse "Prendre soin d'un malade en état sévère"
- Pancarte pour affichage dans la chambre (précautions de base pour les malades en état sévère ou en malaise post-effort))
- Informations institutionnelles sur cette page
- La Compagnie des Aidants (conseils pratiques avec tutos vidéos, par exemple comment faire des shampooings à une personne alitée)
- Pour les jeunes enfants dont un parent est malade, deux ressources dont on a de bons retours : Livre de Tamara Pellegrini “Ma Maman vit avec une maladie invisible mais moi je la vois”. et la Pause Brindilles, association qui agit auprès des jeunes aidants pour prévenir leur isolement, promouvoir l’égalité des chances et soutenir leur santé mentale.