Accompagner une personne en état sévère d’EM.

Rédigé par Millions Missing France - - Aucun commentaire

 

Le 8 août est une journée internationale pour rendre visibles les personnes souffrant sévèrement d’encéphalomyélite myalgique. Elle a été lancée par le collectif 25% SevereME. Nous relayons leur initiative tous les ans.

Un quart des malades atteints d'EM le sont très gravement. Soit, en France, entre 80 000 et 170 000 personnes, l'équivalent de villes comme Dunkerque, Poitiers, Grenoble, Toulon…

Vivre en état sévère avec l’EM est une grande souffrance physique et morale. Des enfants et des adolescents sont aussi concernés.

Accompagner un proche est toujours un chemin difficile. C’est encore plus vrai quand la personne est en état sévère. Chaque moment est un défi, pour la personne malade comme pour ses proches.

L’état sévère, c’est …

Des symptômes graves, même au repos. Une fatigue chronique devenue profondément invalidante. L’épuisement, permanent, est comparable à celui de malades en fin de vie. La capacité de concentration est très faible, regarder une vidéo, lire un texte court, tenir une conversation peut être impossible.

Au début de l’état sévère, la personne a déjà besoin d'aide au quotidien. Vivre seule devient un défi. Elle fonctionne à 20% de ses capacités antérieures. Ses activités sont celles liées à la survie: s’habiller, manger, boire, se laver un minimum, aller aux toilettes en étant souvent aidée et accompagnée. Le moindre geste est un effort qui impose une pause ou une sieste. Elle a besoin de quelqu’un pour le ménage, la préparation des repas, pour se laver les cheveux, pour faire les courses. Confinée au domicile, elle est alitée 20h par jour ou plus, et rarement debout. Le fauteuil roulant est devenu indispensable. Les rares sorties (par exemple pour des rendez-vous médicaux) aggravent son état, souvent pendant plusieurs semaines.

Plus l’état s’aggrave, plus la personne est dépendante. Les malades les plus sévèrement atteints sont au lit toute la journée, ne peuvent plus se laver seuls, ont besoin d’être nourris à la cuiller ou par sonde. Leur pronostic vital est en jeu.

Des enfants, parfois très jeunes, et des adolescents sont touchés. Pour l'immense majorité sans aucune prise en charge médicale. Nathan, 16 ans, a témoigné avec une grande justesse en 2020.

Comment accompagner une personne sévèrement atteinte ?

Cultivez l’ouverture, la patience, la tranquillité, l’empathie. Vous devez vous adapter à la personne malade, car elle ne peut pas s’adapter à vous. Cela implique de changer votre manière d’être et de faire.

Cultivez l’humilité. Vous ne savez pas ce que la personne vit. C’est impossible. Vous ne savez pas mieux qu’elle ce qu’il lui faut. Vous n’êtes pas tout puissant, vous ne pouvez pas la guérir. Vous pouvez juste être présent⋅e et faire au mieux de vos possibilités.

Écoutez la personne et croyez là. Apprenez à comprendre ce qui parfois ne peut être mis en paroles par manque d’énergie. Si elle ne peut pas parler, observez ses gestes, sa posture, ses expressions.

Ne pensez pas à sa place. Ne pensez jamais que vous pouvez savoir mieux que le malade ce qu’il lui faut. Comprenez qu’il y a un gouffre immense entre ce que vous êtes capable de faire et ce que peut faire la personne. Si quelque chose qui vous paraît très facile ne l’est pas pour elle, ne jugez pas.

Ne blâmez pas la personne. Il est difficile de vous comprendre mutuellement  ? Essayez de faire autrement. Si elle ne peut pas parler, observez ses gestes, sa posture, ses expressions. Que pouvez-vous faire de différent  ?

Adaptez-vous aux capacités de la personne. Tous les moments ne se valent pas. Si quelque chose n’est pas possible à un moment donné, attendez un meilleur moment. Soyez attentif aux changements.

Prenez conscience de vos croyances. Vos avis respectent-t-ils la réalité de votre proche malade  ? Vos pensées correspondent-elles à la réalité de la maladie  ? Renseignez-vous sur l’encéphalomyélite myalgique, notre site regorge de ressources. Soyez à l’écoute des besoins de votre proche.

Soyez calme, prudent et attentif. Pas de gestes brusques. Parlez doucement, lentement. Évitez les mouvements quand vous parlez. Respectez des moments de silence et d’immobilité, pour être juste là à ses côtés.

Communiquez efficacement. Parlez clairement, précisez au maximum vos demandes et vos questions. S'il y a des décisions à prendre, privilégiez des questions courtes, précises, auxquelles la personne peut répondre par oui ou non. Attendez patiemment la réponse, certaines personnes ont un temps de réaction ralenti.

Ayez conscience de l’impact de chaque action. Pas d’imprévu. Pas d’initiatives personnelles sans avoir l’accord du malade. Mal adaptés, le moindre mouvement, action ou bruit peut avoir des conséquences graves. Si vous ne suivez pas ce que la personne dit de faire, de la manière dont elle le souhaite, les conséquences peuvent être dramatiques.

Soyez conscient⋅e de l’hypersensibilité sensorielle de la personne malade. Le bruit, la lumière, le toucher, les odeurs peuvent être une souffrance importante pour la personne malade. Ne mettez pas de parfum, n’utilisez pas de parfum d’ambiance sans en avoir discuté avec elle. Attention aux bruits dans la maison. Si votre proche est dans la même pièce, ce n’est pas le moment de regarder la TV ou de faire la vaisselle en entrechoquant les assiettes. Au téléphone, restez immobile, faites attention aux frottements du micro, à l'ambiance sonore.

Prenez des précautions. Prévenez toujours la personne quand vous allez faire du bruit, pour qu’elle puisse prendre ses précautions. Isoler phoniquement la chambre est un plus. Casque anti bruit et bouchons d’oreille font partie de l’attirail nécessaire pour une personne en état sévère. Prévoyez des dispositifs pour réduire la luminosité, rideaux légers par exemple ou stores à lamelles, mais aussi différentes lunettes de soleil plus ou moins sombres.

Ne vous laissez pas envahir par vos propres émotions et vos angoisses. S’il y a une réaction négative de la part de votre proche, ne le prenez pas comme un rejet personnel sans comprendre sa souffrance et sa réalité. Que s’est-il passé pour qu’il y ait cette réaction négative   ? Avez-vous fait une erreur ? Est-ce une réaction qui n’est que du côté de la personne malade (par exemple elle est irritable parce qu’elle souffre beaucoup)  ? Essayez d'en discuter avec elle lorsqu'elle le peut, tranquillement. Vous vous énervez, vous sentez monter la colère ? Éloignez-vous.

Faites vous aider autant que possible. Vous ne pouvez pas tout faire tout seul et tout le temps. Parfois il faut faire un pas de côté pour faire moins: par exemple il peut être plus facile de faire vous-même le ménage chez la personne malade et d’embaucher quelqu’un pour faire le vôtre, si vous le pouvez. Utilisez les drive ou les livraisons à domicile pour la majorité des courses. Il existe dans tous les départements des structures qui offrent du soutien et/ou des groupes de parole aux aidants (toutes maladies confondues ou spécialisées. Il n'en existe pas encore pour l'EM). Contactez le centre d'action communal et social de votre ville pour avoir leurs coordonnées.

Prenez soin de vous. Vous vivez une réalité difficile. Acceptez que la perfection n’est pas possible. Faites simplement de votre mieux. Prenez des temps de repos et de répit. Gardez des moments pour vous, avec des activités qui vous font du bien. Faites vous accompagner par un professionnel et les associations pour vous soutenir.

Préparez-vous à avoir des conversations sur la mort. L’immense majorité des malades sévèrement atteints envisage le suicide ou l’euthanasie à un moment donné. Comprendre cette demande, face à l’enfer que traverse la personne malade, est indispensable. N’émettez pas de jugements moraux. Faites preuve plus que jamais de bienveillance. Prenez contat avec notre association si la question du suicide ou de l’euthanasie revient fréquemment.

Gardez l’espoir, sans jamais minimiser la souffrance de la personne. Tenez-vous au courant des avancées, pour en parler à votre proche. Il n’y a jamais eu autant de recherches, que ce soit pour comprendre la maladie, pour la mise au point de tests diagnostiques et même pour des traitements.

Images

1. En haut à gauche. Malade de l'EM en fauteuil roulant devant fenêtre voilée. Crédit Millions Missing France.
2 Femme allongée sous les couverture. Crédit Millions Missing France
3. Malade de l'EM, avec casque antibruit et lunettes sombres. Crédit Millions Missing France

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