A propos de l'EM
L'encéphalomyélite myalgique (EM) est une maladie systémique invalidante, reconnue par l'OMS depuis 1969 [1]. Elle figure dans la classification actuelle de l'OMS sous le code 8E49 (CIM 11), dans les maladies neurologiques. Elle apparaît souvent brutalement, notamment suite à une infection (mononucléose - virus d'Epstein-Barr, grippe, virus de l'herpès humain (HHV6), cytomégalovirus, parvovirose, infection par Giardia, Shigella etc.), mais elle peut aussi se développer progressivement.
En France, l'EM est reconnue dans la classification officielle des maladies (CIM10FR, code G93.3), mais il n'y a ni recommandations officielles de prise en charge ni formation médicale. Les malades attendent souvent plusieurs années avant d'avoir un diagnostic. Cette errance médicale aggrave leur état par excès de stress et absence de prise en charge adaptée. Il est difficile d'avoir une ALD[2] ou une reconnaissance MDPH [3]. À la maladie s'ajoute souvent la précarité financière.
La méconnaissance de la maladie crée un climat d'incompréhension, voire de discrimination et de maltraitance : les malades se retrouvent trop souvent isolés, sans aucun soutien du corps médical ou de leurs proches.
Diagnostiquer la maladie
Il n'existe pas de marqueurs biologiques, c'est à dire des examens qui permettent aujourd'hui de dépister à coup sûr l'EM. Le diagnostic est basé sur le respect de critères spécifiques, couplé à l'élimination d'autres maladies connues provoquant le même type de symptômes.
Les critères pour définir l'EM varient selon les consensus médicaux. Nous avons choisi ceux du consensus international médical de 2011, qui ont le mérite d'être beaucoup plus spécifiques et permettent de mieux distinguer l'EM d'autres maladies qui partagent des symptômes proches. Pour évaluer si vous répondez aux critères de diagnostic de l'EM selon les critères de ce consensus, test en ligne réalisé par l'association suisse Schweizerische Gesellschaft für ME&CFS. Ce test ne remplace l'avis d'un médecin spécialisé.
Critère obligatoire : le "malaise post-effort"
Appelé aussi exacerbation des symptômes post-effort ou crash, le malaise post-effort apparaît après une surcharge physique, mentale, sensorielle ou émotionnelle qui dépasse même de peu les capacités des malades. Il peut être immédiat, mais est souvent décalé de plusieurs heures à plusieurs jours après la surcharge. Sa durée varie, de quelques heures à plusieurs jours, voire des semaines. C'est un symptôme très spécifique de la maladie.
Les critères de diagnostic de l'EM sont les suivants :
Épuisement physique et intellectuel chronique, avec réduction importante des activités quotidiennes, sociales, de loisirs et professionnelles. Il s'accompagne des symptômes suivants :
- fatigabilité marquée, rapide, physique ou cognitive, en réponse à un effort ou une activité (y compris du quotidien).
- exacerbation des symptômes (douleur, état grippal, vertiges, brouillard cérébral…) et/ou apparition de nouveaux symptômes
- temps de récupération prolongée, 14 h a minima, généralement plus de 24 h, voire des jours, des semaines, des mois.
- seuil bas de fatigabilité physique et mentale en comparaison de l'état avant le MPE
Déficiences neurologiques
Au moins un symptôme dans 3 des catégories suivantes
Troubles neurocognitifs
- difficultés à traiter l'information : pensée ralentie, confusion, désorientation, difficultés de concentration, substitution d'un mot par un autre…
- perte de la mémoire à court terme : mémoire de travail pauvre, difficulté de se souvenir de ce qu'on allait dire…
Douleurs
- maux de tête, migraines, céphalées de tension...
- douleurs significatives : musculaires, articulaires, neurogènes, digestives, thoraciques… Souvent généralisées et migrant d'un endroit à l'autre, d'un type à l'autre.
Troubles du sommeil
- sommeil perturbé : insomnie chronique, sommeil réduit ou au contraire prolongé, rêves importants, cauchemars, perturbations du rythme (inversion du cycle veille-sommeil, chaos des cycles de sommeil, réveils fréquents)...
- sommeil non réparateur, somnolence diurne.
Troubles moteurs et de la perception
- perception neurosensorielle : incapacité à concentrer la vision, hyersensibilité au bruit, à la lumière, au toucher, aux odeurs…
- moteur : faiblesse musculaire, mauvaise coordination, perte d'équilibre…
Troubles immunitaires, gastro-intestinaux, génito-urinaires
Au moins 1 symptôme dans 3 des catégories suivantes :
- symptômes pseudo-grippaux : maux de gorge, sinusites, ganglions, fièvre… s'activant ou s'aggravant à l'effort.
- susceptibilité aux infections et périodes de récupération prolongée
- troubles digestifs : nausées, douleurs abdominales, ballonnements, syndrome du colon irritable, sibo…
- troubles génito-urinaires : urgences urinaires, urine la nuit, ou très souvent
- sensibilité accrue à certains aliments, aux médicaments, produits chimiques
Troubles dans la production d'énergie
Au moins un symptôme
- cardiovasculaire : vertiges, étourdissements, palpitations, intolérance orthostatique, syndrome de tachycardie orthoposturale…
- respiratoire : respiration laborieuse, impression de manquer d'air, douleurs thoraciques...
- température corporelle non stable : inférieure à la normale, transpiration nocturne, extrémités froides, accès de fièvre…
Comment vit-on avec l’EM ?
Tous les malades souffrent d'une diminution très importante des fonctions physiques et cognitives. Les malades sont confrontés à différents stades évolutifs de la maladie, altérant plus ou moins gravement leur état.
La gestion quotidienne de la maladie implique une vigilance de tous les instants pour éviter un malaise post-effort. Ce dernier peut arriver après des activités très bénignes, comme prendre une douche ou faire des courses quand on est en état léger/modéré, se lever du lit ou se brosser les dents pour les malades en état sévère. La personne se voit obligée de réduire et de fractionner ses activités. Elle peut perdre son autonomie et devenir dépendante, y compris pour les actes d'hygiène élémentaire.
Selon des enquêtes menées auprès de malades, le niveau de qualité de vie des malades atteints d'EM est inférieur à celui des patients souffrant de sclérose en plaque, de diabète, d’insuffisance rénale, respiratoire ou cardiaque ou de différents types de cancers.
Il existe plusieurs niveaux de sévérité :
-
25% des malades environ sont en état dit « léger ». Ils peuvent perdre jusqu’à 50% de leurs capacités physiques et cognitives antérieures. Certains parviennent encore à travailler (souvent à temps partiel), au prix de repos fréquents, d'une hygiène de vie drastique et du sacrifice d'une grande partie de leur vie sociale ou de leurs activités de loisirs.
-
50% des malades en état "modéré" sont incapables de travailler. Ils restent autonomes dans leur vie quotidienne, mais leur activité est très réduite du fait de leurs symptômes et ils doivent rester allongés une bonne partie de la journée. Tous ont abandonné des carrières et des loisirs qu'ils aimaient. Leur vie sociale est restreinte.
-
25% des patients sont en état sévère, confinés à leur domicile la plus grande partie du temps. Ils ont besoin d'aide pour les courses, le ménage, la préparation des repas. Parmi eux, les malades en état très sévère sont alités en permanence dans la pénombre et isolés des bruits. Ils ont besoin d'aide pour tous les actes élémentaires de la vie quotidienne.
Maladies associées
Les maladies associées sont très nombreuses et varient selon les malades. Parmi elles : troubles du système nerveux autonome, syndrome d'intolérance orthostatique (STOP), troubles du métabolisme, maladies endocriniennes, dysfonctionnement du système immunitaire, maladies auto-immunes (Hashimoto, Gougerot-Sjögren, Ehler-Danlos...), syndrome de la vessie irritable, maux de gorge, troubles digestifs (SII, SIBO), syndrome de Raynaud... Il existe des risques accrus de maladies auto-immunes, de toubles cardiovasculaires, d'AVC, de cancers. Dans les cas très sévères, le pronostic vital peut être engagé, en lien avec l'épuisement du corps et la malnutrition.
Peut-on guérir de l'EM ?
Même si à l'heure actuelle il n'existe pas de traitement curatif, on observe des rémissions spontanées, donc oui, on peut guérir de l'EM. Mais c'est très peu fréquent. En ayant une prise en charge médicale adaptée des symptômes, une bonne hygiène de vie, des stratégies quotidiennes de gestion de l'activité, de l'aide et une compréhension de l'entourage, beaucoup de malades voient leur état s'améliorer. Ces améliorations peuvent se maintenir dans le temps, très souvent au prix d'une grande vigilance. Mais une rechute peut survenir malgré ces précautions. Malheureusement, ces précautions ne garantissent pas une stabilisation ou une amélioration de la maladie. Les facteurs d'amélioration ne sont pas des promesses de guérison. Personne n'a de boule de cristal, personne ne peut dire à un⋅e malade "Tu vas guérir" ou au contraire "Tu ne peux pas guérir". La recherche avance, y compris concernant des essais de traitement et plusieurs chercheurs et cliniciens pensent que l'EM est potentiellement réversible. Garder espoir permet de mieux faire face quand on est malade.
La situation médicale
Reconnaissance de la maladie.
Alors qu'elle est identifiée par l'Organisation Mondiale de la Santé depuis 1969 et qu'elle figure dans la classification officielle française des maladies, la maladie n'est pas enseignée en faculté de médecine ni en formation continue. Elle ne fait pas l'objet de recommandations officielles de prise en charge, ni de reconnaissance par la Sécurité Sociale (invalidité, ALD etc).
Beaucoup de professionnels du corps médical et de sociétés savantes nient l'existence de la maladie, malgré la mise en évidence de résultats biologiques anormaux chez les patients et près de 10 000 études scientifiques. Vous retrouverez quelques unes de ces études dans ce document de synthèse créé par ME Asso UK et traduit par Millions Missing France, et les plus récentes dans notre bibliographie.
Il y a très peu de financements pour la recherche sur l'EM en France. La prévalence varie, selon les études et les définitions de cas, de 0,2% à 1% de la population. En France, 440 000 adultes et 17 700 enfants et adolescents a minima sont concernés en 2023, dont l'immense majorité n'est pas diagnostiquée. Ce nombre pourrait être doublé suite à la pandémie de Covid-19.
Errance médicale
Il n'existe pas encore de test biologique ou d’anomalie spécifique d’imagerie permettant de poser le diagnostic. Les malades passent souvent plusieurs années à consulter de nombreux médecins.
Des particularités sont trouvées chez les malades d'EM dans de nombreuses études (dysfonctionnement enzymatique, dysfonctionnement immunitaire, profil atypique des protéines de stress dans les biopsies musculaires, taux de lactate anormalement élevé au repos etc).
La recherche avance et plusieurs pistes semblent prometteuses, que ce soit pour la mise en place de biomarqueurs fiables pour diagnostiquer l'EM, mais aussi pour des traitements.
Solitude et précarité
L'absence de reconnaissance de cette maladie neuro-immune multisystémique très lourdement invalidante a de graves conséquences sur la vie des malades et de leurs proches. Incompréhension, préjugés négatifs, psychiatrisation abusive, absence de prise en charge médicale adaptée sont autant de maltraitances. La reconnaissance du handicap et les aides financières ou humaines qui lui sont liées sont très difficiles à obtenir. La précarité financière, l'absence de soutien ou d'information des proches aidants génèrent des difficultés relationnelles dans les familles. Les proches sont mis à contribution bien souvent au-delà de leurs propres limites, beaucoup de couples ou de familles se brisent. Le risque de suicide est élevé.
Pour aider les malades et leurs proches
Nous avons mis en ligne des ressources en libre accès, à consulter et/ou télécharger, pour les malades, leurs proches, les professionnels de santé. La plupart sont en français, notre équipe de traducteurs et de traductrices fait un formidable travail !
💌 Pour nous contacter
Pour adhérer, c'est par ici